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L'astragale de Cassiopée
4 février 2012

Comment comprendre la Hongrie ?

 

COMPRENDRE LA HONGRIE (How to understand Hungary)

 George Schöpflin, 6 February 2012

Source : http://www.opendemocracy.net/george-sch%C3%B6pflin/how-to-understand-hungary

Au vu du titre, puis de la lecture de cet article, j'ai pensé utile de présenter un point de vue hongrois, en proovenance d'un membre du Fidesz. L'universitaire George Schöpflin aime bien les mots sophistiqués. Son texte est lui-même ... empreint de quelques sophismes. Mais mieux vaut connaître l'argumentation du pouvoir hongrois. Comme à l'accoutumée, c'est traduit vite, sans souci de style. J'ai essayé d'être objectif dans le choix des mots. Je ne suis pas certain d'y être toujours parvenu. Rappelons donc que seul le texte publié sur le site OpenDemocracy fait autorité. Enfin, au sens linguistique.

Pour retrouver le site de l'auteur (en magyar) http://www.schopflingyorgy.hu/

Comment comprendre la Hongrie

George Schoepflin , 6 Février 2012

le chapeau d'OD : La représentation de la Hongrie et son gouvernement actuel par les médias internationaux et les acteurs externes est unilatérale et manque de contexte, dit le membre du corps académique et du Fidesz du Parlement européen, György Schöpflin. Les effets s’en font sentir dans le pays, et soulèvent de sérieuses questions sur l'Union européenne et ses valeurs.

À propos de l'auteur : György Schöpflin est un membre du Parlement européen membre du Fidesz (Union civique hongroise). Il était auparavant professeur de sciences politiques (chaire Jean Monnet ?) à l'University College de Londres. 

Comprendre un autre pays -  sa politique, la culture de la société, les idées préconçues - est toujours plus difficile qu'il n'y paraît à première vue. L'affaire est aggravée lorsque ceux dont le travail consiste à «traduire» un pays ne font pas un travail particulièrement bon. Un des facteurs qui rendent cette compréhension difficile, c'est ce qu'on pourrait appeler "le déficit discursif». La voix d'une petite culture avec sa langue très spécifique est par définition plus faible que celle d'une grande communauté culturelle - l'anglais est universellement compris, le hongrois ne l'est pas.

Le résultat est que ce qui est connu sur la Hongrie inclura nécessairement des malentendus, des manques, des ignorances, des préjugés et une impatience face aux explications provenant du petit pays, en particulier si ces explications ne correspondent pas aux attentes des "traducteurs". Le résultat est trop souvent un ensemble de croyances réductrices pétrifiées, traitées comme des faits, des croyances extrêmement difficiles à ébranler. De fait, il en résulte une négligence grossière de toute argumentation fondée sur des preuves et son remplacement par l'idéologie, les préjugés ou l'ignorance, ce qu’on peut raisonnablement qualifier de «fermeture épistémologique». Dans le cas de la Hongrie, cette attitude a été si loin que nous pouvons en toute certitude parler d'une présomption de culpabilité quoi que le gouvernement hongrois dise ou fasse. En fait, il lui revient de prouver son innocence.

 Un problème de vision

 Le point de départ pour une évaluation précise de la Hongrie d'aujourd'hui, c'est que c’est une société profondément divisée. Il ya deux « narratives » (je ne traduis pas ce mot, intermédiaire entre histoire, récit, etc.) radicalement différents : celui de la gauche et celui de la droite - et les deux n’ont guère de respect pour l'autre. Il est presque impossible aux étrangers de reconnaître, de comprendre ou d’accepter cela. L’idée qu’il existe en gros deux sociétés hongroises, chacune avec sa propre idée de la vérité, est tout à fait étranger à l’idéaltype d'un État européen démocratique. Pourtant, c'est la réalité hongroise. Écouter un seul côté faussera automatiquement la compréhension de ce qui se passe en Hongrie.

 Le problème est que les médias internationaux ne représentent qu'un côté du débat et ne reflètent que l'un des deux « narratives », le plus proche de ses propres idées préconçues. Le « narrative » que les médias ont accepté est celui de la gauche, c’est-à-dire de l'opposition, à quoi s’ajoute que seul ce que la gauche dit est la vérité. Ce que la gauche dit s’ajuste sans nul doute avec les présupposés de la plupart des journalistes occidentaux, intrinsèquement suspicieux du pouvoir et surtout des gouvernements de centre droit.

 Ainsi, il est extrêmement difficile pour les médias non-hongrois, pour les diplomates, pour les ONG, et pour la société civile d’accepter la division qui constitue la réalité de la vie politique hongroise. Il est encore plus difficile pour eux de voir que la gauche hongroise ne fait pas de quartier dès lors que le gouvernement, le Fidesz, et surtout le Premier ministre, Viktor Orban, sont concernés. Les lecteurs et les téléspectateurs hongrois ont pris l'habitude de ce langage extrême qui passe pour un débat politique en Hongrie. Quant aux "outsiders", ils auront beau relativiser partiellement la diabolisation que la gauche se permet régulièrement, ils supposeront qu’il doit y avoir du vrai là-dedans.

 Cet échec manifeste à prendre les réalités hongroises en compte , et la volonté de s'appuyer sur des clichés commodes comme le «populisme», «l'extrémisme», la «xénophobie» et l’«anti-sémitisme" (tous utilisés à l’encontre du gouvernement hongrois), ridiculise l’idée d’objectivité journalistique, de neutralité et d’impartialité des journalistes - tout ce qui fonde la légitimité du journaliste. Ces clichés définissent l’adversaire ou l’ennemi, alors que ceux qui sont engagés dans la «lutte» contre eux défendent la morale (occupying the high moral ground). Trop souvent, ceux qui écrivent  sur la Hongrie accepter ce que leurs interlocuteurs leur disent sans parvenir à remonter aux sources.

 Dans cette optique, il n'est pas surprenant que le contexte de la politique hongroise soit aujourd'hui la plupart du temps absent de la manière dont la Hongrie et le gouvernement hongrois sont traités. Ce qui est crucial ici, nul nr prend en compte comment et pourquoi le centre-droit a obtenu une majorité des deux tiers aux élections de 2010 et quel a été son projet depuis.

 Les huit années de mandat du centre-gauche (2002-10) ont été un désastre total en termes de bien-être de la société, de développement d’une culture politique démocratique et, surtout, de gouvernement propre - au contraire, la gauche a été corrompue jusqu’à l’os. Négliger ce contexte, et le fait que l'opinion internationale a laissé la bride sur le cou au gouvernement de centre-gauche, sont considérés par beaucoup en Hongrie comme une source majeure d'incompréhension et d'incohérence. D’où un fort ressentiment.

 Cette négligence est encore manifeste, par exemple, quand on ne note pas le soutien solide dont le gouvernement continue - en dépit d'une détérioration de la situation économique - de profiter. La manifestation pro-gouvernementale du 21 Janvier 2012 a vu près de 400.000 personnes dans les rues de Budapest. Ce chiffre a été lourdement sous-estimé, alors qu’on a accordé beaucoup plus d'attention à la bien plus petite manifestation antigouvernementale du 2 Janvier. Beaucoup de Hongrois éprouvent du ressentiment  face à ce « deux poids deux mesures ».

 En outre, rares semblent les observateurs qui constatent que l'effet des attaques contre le gouvernement hongrois ont suscité un renforcement marqué du soutien non seulement au Fidesz, mais aussi au Jobbik (droite radicale), qui bénéficie actuellement du soutien de près d'un quart de l'électorat (environ autant que les trois partis de gauche confondus). Tant pis pour les conséquences imprévues. Une autre conséquence est que ces attaques fournissent des motifs au gouvernement pour affirmer que l'ingérence extérieure fausse la stratégie du gouvernement. Il est clair que même quelques-uns des opposants de centre-droit au Fidesz font bloc avec lui sous l'effet de la critique étrangère.

 Une question de valeurs

 En effet, le rôle des acteurs externes dans les affaires intérieures des états membres de l'Union européenne est une question de plus en plus aiguë (voyez les gouvernements technocratiques en Grèce et en Italie, et la proposition visant à imposer un commissaire du budget à la Grèce). Le projet de la Commission européenne de gauche de lancer une procédure contre la Hongrie en vertu de l'article 7 du traité sur l'Union européenne, qui en cas de succès priverait la Hongrie de ses droits de vote, peut être placé dans ce contexte. Cela soulève un certain nombre de questions délicates. Est ce que l'UE est un acteur interne par rapport à un état membre ou est-ce un acteur externe - et où est la frontière entre les deux? L'UE peut-elle agir à la majorité, sans un large consentement ? Quel est le bien fondé des accusations portées contre la Hongrie (parce que si ces accusations sont faibles, alors on se trouve en face d'une simple déclaration politique de culpabilité, où la voix de la Hongrie n’est pas entendue)? Le principe sacré de l'audition des deux côtés, audi et alteram partem , est ignoré.

 Cet unilatéralisme conduit aussi à négliger le fait que le gouvernement hongrois et l'opposition existent dans une sorte de réciprocité négative. La gauche a construit son identité autour de l'idée que le Fidesz est de mèche avec le diable : qu'il est raciste, xénophobe et en quelque sorte l'incarnation du mal. Le Fidesz voit la gauche, et tire donc partie de sa propre légitimité, de la proposition selon laquelle elle est irresponsable, corrompue et n'a jamais voulu se défaire de ses bagages, notamment des violations des droits de l'homme [qu’elle a] commises pendant l'ère communiste. Cette interdépendance négative contribue à la polarisation qui permet la gauche d'ignorer les aspirations de la société hongroise et au Fidesz de considérer la dépendance de la gauche hongroise vis-à-vis de l’étranger comme illégitime. Ce point n’est que rarement, sinon jamais, pris en compte dans l'image que dépeignent les médias.

 Le niveau actuel d'intervention dans les affaires intérieures d'un état membre génère des questions de légitimité, une opposition et un scepticisme croissants quant à la valeur de l'UE elle-même en Hongrie, notamment parce qu'il n'est pas question de réciprocité. Les acteurs externes semblent libres d'intervenir dans les affaires hongroises et pour certains, cela va certainement jusqu’à déstabiliser le gouvernement Fidesz et à renverser le Premier ministre. En revanche, il est considéré comme scandaleux pour la Hongrie de soulever des sujets de préoccupation avec l'espoir d'être entendue, comme l'anxiété au sujet de la loi linguistique slovaque, qui empiète sur les droits de la minorité hongroise. La véritable crainte est devoir les petits États victimes d'intimidation par les grands états au nom des droits de l'homme, de (quelques) valeurs européennes et de militants de gauche armés de leurs idées préconçues unilatérales, ainsi que du pouvoir lui-même.(in the name of human rights, (some) European values and left-wing actors armed with one-sided preconceptions, as well as by power itself : texte peu clair).

 Ces acteurs externes ne sont évidemment pas au courant de leur rôle dans la politique intérieure hongroise. Les petits pays ont tendance à être beaucoup plus sensibles à l'opinion extérieure que les grands. Cela a donné lieu à une interaction réflexive partielle - l'opinion hongroise entend ce que les acteurs étrangers disent, mais l'inverse n'est pas vrai. Cela génère un ressentiment qui s'intensifie. Personne ne l'aime quand leurs affaires intérieures subir une intervention permanente (sustained) de l'étranger, ce qui explique les pancartes brandies au cours de la démonstration du 21 Janvier, "Nous ne sommes pas une colonie".

 Dans l'évaluation de la relation entre la Hongrie et l'UE, il est essentiel de séparer les dimensions politiques et juridiques de l'affaire. Les questions juridiques sont claires et définies, elles sont donc ouvertes à la négociation et à une solution. Les aspects politiques sont vagues et imprécis quant à ce que le gouvernement hongrois doit faire. Les choses empirent du fait de l'habitude des critiques de la Hongrie de passer de l’un à l’autre [du politique au juridique]. Quand les objections légales sont prises en compte, alors les objections politiques sont élevés, et

Finalement, la question se résume à la question de savoir qui décide quelles sont les valeurs européennes : ce peut-il être la gauche seule [qui en décide], ou faut-il un consensus plus large? Si la Hongrie est, en effet, jugée agir en violation de ces valeurs, est-ce le seul état membre de l’Union qui est correctement distingué de cette façon? Si non, alors les autres ne devraient pas également être soumis à des procédures d'infraction ou équivalent? Sinon, un double standard (deux poids deux mesures) est manifestement en marche.

 Derrière tout cela se cache le soupçon que la Hongrie est instrumentalisée, pour détourner l'attention des lacunes apparues ailleurs, dans les pays d'Europe occidentale, qui semblent exporter leur culpabilité vers l'est. Si ce soupçon est exact, alors le rôle dévolu à la Hongrie est tout sauf accidentel. D'autres États sont tout aussi susceptibles d'être visés. En effet, il n’est pas improbable que la Roumanie puisse être le prochain sur la liste.

 On peut lire, du même auteur, un article plus ancien, datant de l’époque où les socialistes étaient au pouvoir :

GUERRE CIVILE FROIDE EN HONGRIE (Hungary's cold civil war)

George Schöpflin, 14 November 2006

http://www.opendemocracy.net/democracy-protest/hungary_civil_4093.jsp

 également : un article de Miklos Haraszti, vieux de dix ans, remontant à l’époque ou Orban s’est fait battre par les socialistes « LE VRAI VICTOR ORBAN » (the real Viktor Orban)

source : http://www.opendemocracy.net/democracy-newright/article_358.jsp the real Viktor Orban by Miklos Haraszti, 1 May 2002

Ces deux derniers articles ne seront pas traduits. Ceux qui s’intéressent à la Hongrie iront voir

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J
j'ai posté un exposé d'un membre du Fidesz. Cliquer sur la colonne à droite (derniers messages) "Comprendre la Hongrie" : ça permet de comprendre comment ils fonctionnent.
L'astragale de Cassiopée
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