Freud, l'autre.
Il y a dans le dernier numéro de la LRB (London Review of Books), un article de Julian Barnes A Portrait of Lucian Freud, où il recense deux livres sur le peintre Lucian Freud : Man with a Blue Scarf: On Sitting for a Portrait by Lucian Freud by Martin Gayford Thames and Hudson, 248 pp, £12.95, March 2012, ISBN 978 0 500 28971 6 et Breakfast with Lucian: A Portrait of the Artist by Geordie Greig Cape, 260 pp, £25.00, October, ISBN 978 0 224 09685 0
Lucian Freud y apparaît comme un personnage assez révoltant à bien des égards. Je comprends mieux pourquoi j’ai toujours détesté sa peinture. Certains remarques de L. Freud sur les femmes sont tout bonnement scandaleuses. Voici un extrait (léger) de l’article de Barnes :
Et il ya même des moments où l'insistance de Lucian Freud à vivre sa vie exclusivement selon ses propres normes, les autres n’ayant qu’à s’adapter en conséquence, a un côté comique. Voici une histoire qui est clairement significative pour lui, car il la raconte à la fois à Gayford et à Greig avec peu de variations :
Par exemple, j'aime les épinards servis sans huile ni beurre. Même si, je peux imaginer que si une femme dont je serais amoureux cuise les épinards cuits à l'huile, je les aimerais cuits comme ça. Je voudrais également jouir du léger héroïsme d’aimer ça quand bien même je n'aurais pas l'habitude de les apprécier cuits de cette façon.
Si c'est ça l'idée que [Lucian] Freud se fait du compromis héroïque que peut faire un homme quand il est amoureux d’une femme, il n'est pas surprenant que les maîtresses de maison de la bonne société londonienne ne l’aient pas considéré comme le gendre idéal.
Evidemment ça fait revenir en mémoire l'histoire de "Fontenelle, neveu de Corneille et auteur d’"Entretiens sur la pluralité des mondes" [qui] était réputé pour son bel esprit et sa gourmandise. Il raffolait des asperges à l'huile. Un jour, il reçut l’abbé Terrasson, amateur d’asperges au beurre. La mort dans l’âme, Fontenelle fit donc préparer au beurre la moitié des asperges. Au moment de passer à table, l’abbé fut victime d’une attaque d’apoplexie. Alors, Fontenelle fonça à la cuisine et cria: "Toutes les asperges à l"huile! Toutes à l’huile!" source http://www.leguidedesconnaisseurs.be/article276.html
Et pour en terminer avec la cuisine littéraire :
Les épinards et Saint-Simon ont été mes seuls goûts durables, après celui toutefois de vivre à Paris avec cent louis de rente, faisant des livres. Stendhal, Vie d’Henry Brulard
le même § de la LRB en v.o. And there are even moments when Freud’s insistence on living life entirely on his own terms, with others fitting in accordingly, has its comic side. Here is a story which clearly means something to him, as he tells it to both Gayford and Greig with little variation:For example, I like spinach served without oil or butter. Even so, I can imagine that if a woman I was in love with cooked spinach with oil, I would like it like that. I would also enjoy the slight heroism of liking it although I didn’t usually enjoy it served in that way.If this was Freud’s idea of the heroic compromise a man makes when in love with a woman, it’s not surprising that London’s society hostesses did not consider him son-in-law material.
Source : http://www.lrb.co.uk/v35/n23/julian-barnes/heart-squasher