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L'astragale de Cassiopée
14 avril 2010

Enigme de Kara

       Merci à Kara pour cette énigme...

" L'Orient-express filait à toute allure... Dans le compartiment de première classe aux rideaux tirés où je m'étais assis, en dehors de moi, trois femmes voyageaient, trois turques modernes jusqu'au bout des ongles, sans voile ni préjugés : l'aïeule, la mère et une jeune fille de quinze ans, qui s'appelait  Kütchük.

    Je regardais longuement, ravi, cette charmante famille. L'aïeule, la mère et la fille se trouvaient réunies comme sur certaines montagnes des Alpes,  l'Hiver, l'Eté et le Printemps.

     L'aïeule, une matrone grande et sèche de quatre-vingts ans, vêtue de noir, dormait sur la banquette, portant d'énormes perles noires au cou. Dans son sommeil, elle parlait turc.
Elle levait parfois ses mains ridées, aux veines mauves et gonflées, à son visage pour le couvrir car pendant la majeure partie de sa vie, elle avait porté le voile, et même là, endormie, elle devait sentir que son visage était à découvert, de façon indécente.

     La mère était d'autant plus moderne. Progressiste quasi ostentatoire. Ses cheveux, qui devaient jadis être d'un noir de jais, étaient décolorés en jaune paille. Elle était directe. Elle fumait cigarette après l'autre et serra la main démocratiquement – au contrôleur qui entra. Par ailleurs, elle lisait le dernier livre de Paul Valéry.

    Kütchük était une pâtisserie au miel, blanche et rose. Elle portait une robe de soie rose, et son minois était aussi blanc que la crème fouettée. Ses Cheveux aussi étaient décolorés en jaune paille. En tout point,  elle semblait le disciple de sa mère. Elle avait presque honte d'être turque. Seules le révélaient ses babouches de cuir rouge qu'elle avait mises dans le train, et la quantité de bouquets de roses qu'elle avait apportés avec elle. Toutes ces rose de Constantinople  d'un rouge ardent, saignant,  qui depuis l'aube embaumaient tout le compartiment comme un jardin, et puis son chat angora sous lequel elle avait étendu un tapis turc, son chat angora aux yeux bleus, sourd, sur le songe duquel elle veillait tendrement.(.....)

BV

[...]

Elles se rendaient à Vienne, de là, à Berlin, de là, à Paris, de là à Londres. Elles étaient splendidement instruites. La fille parlait des vitamines B et C, la mère, de Jung et d'Adler, des nouvelles écoles Hérétiques de psychanalyse.

    Elles savaient parfaitement toutes les langues. Elles commençaient avec le français, dans la langue littéraire la plus pure, puis elle passait à « l'argot* », peu après elles y mêlaient des mots allemands-faisant alterner le parler berlinois avec le dialecte de Lerchenfeld-, mais entre temps elles papotaient en anglais , et même en italien. Elles n'en tiraient aucune vanité. Elles s'en réjouissaient, comme des enfants qui se font comprendre des adultes, et circulent, s'affirment partout comme chez eux.

Il semblait que leur ambition soit d'être prises au sérieux et considérées comme des Occidentales.

J'aurai voulu leur donner à entendre qu'elles surestimaient peut-être un peu l'Europe, et que moi, j'étais loin d'être aussi ravi par notre culture qu'elles. Mais j'abandonnai cette intention. Pourquoi  gâcher leur plaisir ?

Je préférai leur montrer mes huit stylo-plumes, que je gardais en permanence dans ma poche, mes deux molaires en or, que je gardais également en permanence dans ma bouche, et je me glorifiai de ma tension élevée, de ma radio à cinq lampes, de mon début de calcul rénal, et de l'appendicectomie de nombre de mes parents. A chacune, je disais ce qu'il fallait.

     Cela leur fit un effet extraordinaire. Kütchük souriait, me regardait émerveillée de ses sombres yeux féeriques, avec un tel respect, une sincérité si ouverte, que cela me troublait. "

*en français dans le texte.

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Commentaires
K
IIIIILLLLDDDDIIIIKOOO, Casta Diva....Un petit mot sur Kosztolányi?<br /> <br /> Je propose ensuite un peu de sa poésie...
K
"Gyurum te, gyuszum te<br /> taplalo buzam,reszegito borom te.."...Toi ma perle, toi mn dé à coudre, toi mon froment nourissant, toi mon vin enivrant...<br /> <br /> L'ensemble du texte viendra plus tard si certains l'exigent.<br /> Il existe 300 mots d'origine turque dans la langue hongroise.<br /> Kosztolányi a écrit ce texte avec ces mots là...Ainsi mes amis d'ici le reliront en étant jeune turque ou poète hongrois, à leur guise mais en savourant les baisers.<br /> <br /> Sok Puszi !A tous.<br /> <br /> <br /> @Pado, pensez vous qu'un mot peut avoir goût de vanille ,plus tendre encore que" cannelé..." Si oui Orient Full Speed....<br /> dernière page lue hier soir...Comme vous,le septième, manque déjà...une larme...un sourire ...un baiser. <br /> <br /> <br /> @ POur tous, je remercie Le commissaire Pado-vani de m'avoir donné à lire :<br /> <br /> Fréderic.H.Fajardie
K
1°"FRAGONARD : " Baisers volés"<br /> <br /> 2 KOSZTOLÁNYI DEZSŐ : Esti Kornel<br /> <br /> ed: CAmbourakis 2009 'VII chapitre/XVIII<br /> <br /> Il me reste à vous donner quelques élèments linguistiques pour mieux goûter le style...vous vous en doutez déjà.
K
( Voici donc la fin de cette nouvelle : le jeune homme se trouve seul avec la jeune turque dans le couloir du trans- euroP....qui poursuit sa course folle.)<br /> <br /> " .C'est ainsi que je la courtisais :<br /> <br /> -Tu es la première jeune fille turque , disais-je, car je la tutoyais déjà, la toute première jeune fille turque que je rencontre. Kütchük, ma petite, ma toute petite à moi, szeretem. Autrefois, à l'école, j'ai appris la défaite de Mohàcs*. Je sais que tes ancêtres ont répandu le sang de mes ancêtres, et qu'ils nous ont réduits en Honteux esclavage pendant un siècle et demi . Pourtant, je voudrais être à nouveau pendant cent cinquante ans ton esclave, ton valet, ton tributaire, ma chère petite ennemie, ma chère parente orientale. Tu sais quoi ? Faisons la paix. Moi, je n'en ai jamais voulu à ton peuple, parce que c'est de lui que nous avons reçu nos mots les plus beaux, ces mots sans lesquels je serais malheureux. Je suis un poète, un amoureux, un fou des mots. Vous nous avez donné le mot : Perle et le mot : Miroir, et le mot : Cercueil. Toi, la perle qui resplendira dans le miroir de mon âme, jusqu'à mon cercueil .<br /> Est-ce que tu comprends, quand je te dis : Anneau, dé, froment, vin ?<br /> Comment ne comprendrais tu pas , puisque ceux-là aussi sont des mots à vous, et même les lettres, l'écriture qui me fait vivre !<br /> Toi mon anneau, toi mon dé à coudre, mon froment nourrissant, mon vin enivrant. Je vous dois trois cent trente mots des plus élégants. Depuis longtemps déjà, je cherchais quelqu'un, un Turc, à qui je puisse exprimer ma reconnaissance indéfectible pour cela, à qui je puisse rembourser au moins en partie mon emprunt lexical, envers qui je puisse m'acquitter de cette dette étymologique qui depuis lors m' a tellement, tellement, tellement....transporté :o)<br /> Ainsi flambais-je et m'exaltais-je, quand soudain notre train s'engouffra dans le sombre d'un tunnel.... Kütchük défaillit tendrement contre moi. Et moi-lestement et fougueusement-<br /> j'e l'embrassai sur la bouche...<br /> <br /> Si mes souvenirs sont exacts, je lui donnai exactement trois cent trente baisers !:o)
P
Ben voilà, voilà<br /> un petit bonsoir à tous avant de lire les billets nouveaux<br /> Calme après la tempête, <br /> "mine" assoupie, <br /> week-end amicaux "grandes bleues-terrasses" passés.<br /> Suivre la piste aux étoiles est à nouveau possible, <br /> Oumpapah-pah mon frère.............<br /> <br /> D'abord les Poks et cette histoire de cannelés réservés à martinas, <br /> faudrait pas oublier que certains font quasiment le voyage pour la Gironde uniquement pour ça, <br /> alors l'exclusivité, merci !<br /> <br /> Jibé,<br /> j'ai pas tout compris (même sur rêvalire) vos échanges avec Marc Petit mais je suis intéressé de savoir s'il a lu d'Artagnan et le Club des cinq avant d'écrire le Nain géant.<br /> <br /> Indiscrète (mais non),<br /> les trois mots.<br /> Ceux qui sont "intraduisibles", "rares" et si possible proches, donc "l'argot" (en français dans le texte), "Lerchenfeld" et "Kütchük".<br /> Un coup de google livres et roulez petits bolides, pour cette fois ça marche.<br /> Après on creuse.<br /> <br /> Padouilles printanières et ensoleillées quoique parisiennes.<br /> <br /> PS<br /> WE prochain, dernières neiges, <br /> boooouuuuuuhhhhhhhhhhhhh !
L'astragale de Cassiopée
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